Ah non ! Pas elle ! || Pv Bia

La jeune femme - enfin, bref - était allongée sur son lit, installée confortablement entre deux montagnes de coussins, surs ses draps - ce serait stupide qu'un vampire craigne les courants d'air, non ? - alors qu'enfin le soleil était haut dans le ciel. Son visage était inondé de sang, son bras agité de tremblements. Ses traits se déformaient dans un rictus de souffrance, ses lèvres écartées laissant échapper quelques gémissements semblables à des gémissements d'agonie. Évidemment, si l'on était dans sa tête et que l'on pouvait voir ce qu'elle rêvait, la majorité d'entre nous serait terrifiée par la densité de son cauchemar, son réalisme - puisqu'ils étaient des évènements déjà vécus par le vampire. Elle pouvait elle-même ressentir la douleur que lui infligeait la création de son 'tatouage', elle ressentait la même terreur que le visage de son agresseur lui avait inspirée. Lorsqu'elle sentait la torche approcher de son épaule, elle se réveilla soudainement, lâchant un dernier cri. Haletant, elle contempla la lumière solaire ayant déjà envahi la pièce sans retenir une grimace. D'une main tremblante, elle passa ses doigts sur son visage, recueillant les dernières gouttes de sang s'échappant de ses paupières. Soupirant, elle fixa son reflet dans le miroir, elle-même dégoûtée par son aspect peu ragoûtant et même repoussant. Soupirant à nouveau, elle se releva et attrapa un peignoir - elle dort nue et sous sa véritable apparence -. Se fixant encore une fois, elle reprit son illusion, et apprécia encore plus qu'habituellement le fait d'être seule dans sa chambre. Tout d'abord parce que seulement une personne avait survécu à sa véritable forme - elle n'aime pas qu'on la voie comme ça, et les rares qui l'avait vue ne sont plus là pour le raconter - et ensuite parce que la personne la regardant aurait eu peur - enfin toute personne normalement constituée - de son visage en sang, de ses tremblements et de ses hurlements. Bref, elle était heureuse d'être seule, surtout qu'elle n'aimait pas tant que ça la compagnie.

Enfin. Elle sortit de sa chambre, une trousse de toilette à la main, se dirigeant vers les douches. C'était urgent de nettoyer le sang ayant coulé, et par chance à cette heure tardive les couloirs étaient déserts. Elle se plaça avec bonheur sous le jet d'eau, froid ou chaud (elle ne le sentait pas de toute façon). Elle enleva le sang souillant son visage et quelques mèches de cheveux, soupirant de bonheur. Elle termina rapidement, sortant tout aussi vite, toujours emballée dans son peignoir, et regagna sa chambre. Plaçant une serviette sur le lit, elle s'assit en tailleur, ôtant son peignoir, et saisit une petite bouteille contre de vieilles huiles égyptiennes. Elle s'en enduisit le corps - fâcheuse habitude - ayant repris son apparence millénaire. Soupirant, elle se leva pour attraper un chemisier, un jean, et une paire de talons excessivement hauts. Secouant légèrement la tête, elle modifia à nouveau sa forme, et enfila ses vêtements. Elle s'assit par la suite à nouveau sur le lit, toujours en tailleur, et ferma les yeux. L'avantage d'être une illusion, c'est qu'il n'y a aucun besoin de maquillage ni de coiffure très recherchée, ni vraiment d'attentions vestimentaires. Pour une fois, elle avait passé des vêtements sur son illusion (chose éminemment rare, je le répète), ce qui lui évitait d'être nue si jamais elle venait à être trop fatiguée pour tenir son illusion. En fait, elle était surtout trop fatiguée à l'instant pour simuler des habits sur son corps. Elle avait faim, à vrai dire. Très faim. Et il fallait avouer que ce sang en poche qu'elle avait aperçu à son arrivée n'avait pas l'air suffisant pour calmer la soif de cette momie. Alors l'idée de vider quelques élèves lui traversa l'esprit ; idée qu'elle repoussa fermement. Ce n'était pas le moment de se faire virer de l'endroit après tout.

Enfin, elle ouvrit les yeux. Elle se laissa tomber sur le lit, étreignant son nounours excessivement vieux (oui, elle dort avec une peluche : ridicule n’est-ce pas ?). Après l’avoir câliné un long moment, elle se releva, abandonnant l’ancêtre entre les deux amas de coussins, attrapa un petit sac, et sortit de la chambre. Le vampire décida d’aller dans un endroit désert, où la tentation de réduire un élève au silence serait moins forte. Elle se dirigea donc tout naturellement dans le bois qu’elle avait repéré, sautant le mur bordant l’académie avec une facilité toute particulière. Elle se sentait bien dans les forêts. Après tout, elle était entourée d’arbres quasiment aussi vieux qu’elle, ce qui était relativement reposant. Et puis ça lui rappelait de bons souvenirs de carnages, et autres massacres qu’elle avait perpétrés pendant les diverses guerres ayant ravagé l’humanité. D’ailleurs, c’était une des grandes questions qu’elle se posait. Pourquoi les humains se faisaient-ils tout le temps la guerre ? Bon, il est vrai que les vampires n’étaient pas reconnus pour leur comportement pacifique, mais Kathryn ne faisait la guerre que lorsqu’elle y voyait un certain intérêt. Au début, ce fut pour amasser des fortunes et être tranquille jusqu’à la fin de son éternité. Ensuite, c’était à cause de ses envies croissantes en sang. Enfin, elle avait entreprit une vague campagne d’extermination de l’espèce masculine, rapidement abandonnée – le vampire se lasse très vite. Bref, elle n’avait jamais fait la guerre pour faire la guerre. Et puis elle avait tué de toutes les espèces, humains, vampires ou lycans – qui d’ailleurs constituaient un grand amusement pour Kathryn, tellement leurs cris étaient puissants, et tellement ces petites bêtes à poils étaient résistantes en dépit de leur odeur repoussante.

Enfin. Elle s’était installée contre le tronc d’un arbre – donc à l’ombre, forcément – et avait laissé infuser l’absinthe qu’elle avait emportée. Ce liquide vert était le poison qu’elle avait toujours préféré de tous les poisons et drogues existants dans le monde, à par peut-être les quelques drogues égyptiennes. En tous les cas, elle ne pouvait s’en passer. A vrai dire, l’absinthe la rendait de meilleure humeur, et grâce à son invulnérabilité aux maladies et à sa régénérescence naturelle des tissus et autres organes, elle pouvait en absorber une quantité qui aurait tué un homme. Bref, elle adorait ça, et c’était le seul bon point de sa journée. Absorbée par le balancement du plateau, elle sursauta en entendant un bruit de chute. Par chance, elle ne tenait pas le verre, et le poison ne fut pas renversé. Elle releva la tête, observant une femme – vu la chevelure, ça ne pouvait pas être autre chose – étendue au sol, le bras tendu vers une pipe, sans visiblement une envie de bouger. Elle arqua son sourcil à son soupir, et la fixa alors qu’elle se relevait. Bon, elle avait été dérangée, mais pour l’instant, elle n’avait pas encore envie de chasser l’intrus. Par contre, la phrase prononcée par la suite suffit à la décider. Comment ça porcelet vert à pois rouges ? Porcelet vert à pois rouges ! Bon, inutile de vous expliquer pourquoi ça l’a énervée. Elle se releva et renversa l’autre vampire au sol – tout cela en un mouvement trop rapide pour être visible par un humain, bien sûr – la forçant à pencher sa tête sur le côté. Ca sentait bon. Très bon. Trop bon. Alors elle mordit, lui arrachant la moitié de la jugulaire. Elle adorait le sang de vampire. Peut-être trop pour que ça paraisse normal. Mais en attendant, c’était trop tard. Elle se nourrissait enfin, les yeux fermés. Bonheur.

Aaaah ... Le sang. Une des choses les plus merveilleuses de l'humanité. Un liquide vital, pour deux espèces. Les humains, qui se contentaient d'être des sacs à sang, et qui d'ailleurs n'avaient aucune idée de comment utiliser leur sang, et puis les vampires, qui eux savaient comment l'utiliser. A vrai dire, le sang est la chose la plus vitale chez les vampires. Coupez lui la tête, et s'il est assez vieux, il y survivra. Il en faut beaucoup pour tuer un sang pur. N'allez pas croire que le pieu dans le cœur marche à tous les coups. Non, non. Il faut arracher la tête, l'enterrer, et puis le démembrer, et enterrer aussi. On peut y foutre le feu, ça marche également. Le pieu ... Aha. Pardon. Euh, le pieu eh bien ça marche de temps en temps. Sur les jeunots ou les affaiblis. Et le résultat est assez moche. Un amas de sang, et de sang coagulé, et de matière rouge non identifiée et bizarre. Le sang, est plus que vital pour les vampires. Bon, tout d'abord, il les nourrit. Mais leur corps est mort, leurs organes ne fonctionnent plus. Le cœur ne bat pas. Le sang est à la base de leur 'vie'. Videz le de son sang, et il ne survivra pas bien longtemps. A vrai dire, le sang de vampire peut se transformer en drogues, pour certains humains. Parce qu'avec, ils sentent la vie qui les entoure. Ils ressentent la Terre. Certains humains tueraient pour avoir la chance de boire du sang de vampire. Certes, il est délicieux, et si on est en phase avec soi-même, il permet de voir des choses ... bizarres, mais généralement peu de vampires offrent leur sang comme ça. Bref, ça a un effet assez étrange sur eux. Enfin ce n'est qu'un mythe parmi tant d'autres allez vous dire, évidemment.

Ah oui ! Alors, Kathryn appréciait donc encore le goût du sang de ce vampire, qui paraissait ma foi d'un âge convenable, tout en se relevant. Elle recracha la gorge qu'elle avait arrachée sur le côté, et retourna près de son verre d'absinthe, satisfaite. Elle venait de se nourrir, et pour l'instant elle n'avait plus soif. Ses envies de sang étaient calmées, peut-être pas celles de carnage. Oui, à chaque fois qu'elle goûtait le sang de son espèce, ça la mettait dans une espèce de transe : elle passait en mode 'je veux des entrailles et du sang, plus de sang'. Enfin, pour le moment, elle n'en avait pas bu assez pour être véritablement dans ce mode - quelle chance Bia - et il fallait espérer qu'elle n'y entre pas. Bon, il n'y avait pas de raison, son verre d'absinthe la rendant plus aimable. La collante était donc en sûreté. Enfin, si on veut.Ce qui étonna d'abord Kathryn fut son éclat de rire. Elle ne put s'empêcher d'hausser un sourcil, fixant la jeune femme. Elle jouait à passer ses doigts dans sa gorge transpercée. Ridicule. Pire, folie. Le vampire plus que millénaire soupira alors, retournant son attention à son verre d'absinthe. Elle le porta à ses lèvres, fatiguée d'attendre, et en but une gorgée avec un soupir de soulagement. Et puis ... et puis l'autre boulet cria. Bien sûr, la rousse n'avait pas fait attention à la précédente insulte, Picasso, bien qu'il ait été un grand artiste. Sauf que .... sauf que le verre d'absinthe se renversa sur son visage. Là ... là elle était définitivement vexée. Elle se saisit de la bouteille, se refusant à attendre une nouvelle fois, en but une bonne moitié et reconnut enfin celle qui avait gueulé 'mon chou'.

Et c'est à ce moment que les magnifiques réflexes du vampire jouèrent. Fuir. Tout son corps lui criait de fuir. Cette chose ayant visiblement abusé de certaines drogues hallucinatoires n'était autre que celle qui avait osé la toucher quelques siècles auparavant. Celle qui s'était fait arraché le coeur, coupé le bras, et autre chose. Enfin la mémoire n'était plus ce qu'elle était. Aha. Bref ! C'était cette personne détestable qu'elle ... qu'elle retrouvait ... DANS CE PUTAIN D'ENDROIT ! Quand je disais qu'elle n'avait pas de veine, tiens. Enfin si. Mais non. BREF. Tout son être vibrait donc pour la même chose : fuir. Sauf que, elle détestait fuir. C'était lâche, et réservé pour les faibles. Et ce n'était certainement pas comme ça qu'elle arriverait à retrouver le salaud qui avait souillé son corps sublime. Enfin, elle fit donc face, et continua à fixer l'autre tarée en face d'elle, le sourcil relevé. Anticipant un geste possible, elle tendit la main en avant, soupirant légèrement.

« Tu me touches, je te tue. Et réellement cette fois-ci. »

Bon, elle doutait que sa menace soit utile, mais au moins Bia ne pourrait pas dire qu'elle ne l'avait pas prévenue. Soupirant à nouveau, elle baissa son bras et se détourna de la jeune femme, fixant la bouteille de 'Fée Verte'. Elle bougeait ! La fée sur l'étiquette ! Aha. Secouant la tête, elle se concentra, et la fée disparut. Le problème de quant elle buvant de l'absinthe, ce qu'elle voyait, elle le créait. Enfin disons qu'elle en faisait l'illusion. Alors si elle même commençait à y croire, elles étaient perdues, pas vrai ? Car ce qui peut perdre un illusionniste est bien sa propre illusion, non ?